Nouveau deal pour les droits TV : l’âge d’or de la NBA ?

Le 07 oct. 2014 à 18:39 par Alexandre Martin

Adam Silver

C’est désormais officiel, la NBA s’est mise d’accord avec TNT et ESPN pour un nouveau contrat concernant les droits pour la retransmission des matchs. Le moins qu’on puisse dire est que ce deal est très juteux puisqu’il s’agit de 24 milliards de dollars sur 9 ans à partir de la saison 2016/2017. Pour son début de règne, Adam Silver va donc gouverner une grande ligue de plus en plus riche et toujours en pleine expansion. Le “Comish’ ” va devoir également faire face aux répercussions que vont avoir tous ces milliards sur sa NBA. 

Augmentation du salary cap, explosion des contrats joueurs 

Car qui dit gros jackpot financier dit conséquences inévitables sur le système actuel que ce soit au niveau du salary cap, des contrats des joueurs, du rythme de la saison régulière ou encore des relations entre propriétaires et joueurs. Tout le monde va vouloir sa part du gâteau… Bien évidemment , la première conséquence directe de cette nouvelle manne financière venue des chaînes TV sera l’augmentation du salary cap des franchises qui pourrait passer de 63 millions (cette année) à un peu plus de 91 millions dès l’été 2016 d’après Ken Berger de CBS Sports. Ce chiffre de 91 millions se base sur le fait que les droits TV seront distribués en parts égales tous les ans du début à la fin du deal soit 2,67 milliards par an reversés à la NBA et qui rentreront donc en ligne de compte dans le calcul du salary cap dont disposeront les franchises. Comme nous n’avons pas encore de précisions suffisantes sur les détails du deal, chacun peut y aller de son hypothèse. D’ailleurs, pour Zach Lowe de Grantland, les droits TV démarreront à 2,1 milliards sur 2016/2017 et augmenteront progressivement (jusqu’à plus de 3 milliards en 2025/2026). 2,1 milliards alors qu’aujourd’hui les droits TV rapportent environ 900 millions à la NBA, ça fait une sacrée différence et ça fait tout de même un salary cap autour de 85 millions, c’est toujours 22 millions de plus que celui de cette saison, c’est tout simplement énorme !

C’est énorme et ça change un certain nombre de perspectives. Une star comme LeBron James qui – sachant que ce nouveau deal allait changer des choses – n’a signé que pour deux ans avec Cleveland. Le King sera donc agent libre à l’été 2016 et pourra alors signer un nouveau contrat max pour un montant annuel jusqu’à 8 millions supérieur à ce qu’il touche aujourd’hui (20,6 millions). Il y aura d’autres agents libres qui pourront prétendre à de très gros contrat en juillet 2016 comme Kevin Durant par exemple… Bien sûr, Adam Silver a d’ores et déjà déclaré qu’il comptait faire en sorte que cet apport d’argent se fasse doucement et progressivement pour les franchises :

“Quand ce deal va arriver en 2016/2017, il va y avoir une augmentation substantielle au niveau du salary cap annuel […] J’ai eu une brève conversation vendredi avec Michelle Roberts, la nouvelle directrice de l’union des joueurs, pour lui dire que ce nouvel accord arrivait. Et nous nous sommes vus plus tard dans l’après-midi pour évaluer leur (l’union des joueurs) intérêt pour une éventuelle intégration en douceur de ces nouveaux revenus. Bien sûr, ils (les joueurs) auront leurs 51% de toutes les manières. C’est juste une question de comment on intègre tout cet argent en terme de salary cap. Cela aura un effet important et je suis sûr que l’union a déjà commencé à étudier – comme nous l’avons fait – les répercussions sur notre système équipe par équipe. […] Nous savons que certains joueurs – avec leurs agents – ont planifié leurs contrats pour être agents libres à l’été 2016 sachant parfaitement que nous entrerions dans le nouvel accord  avec les chaînes TV.”

En effet, si l’exemple de LeBron James et son contrat de deux ans aux Cavs est flagrant, ce sont bien tous les salaires qui vont être revus à la hausse et pas seulement les contrats max. L’échelle de salaire des rookies, le salaire minimum, la Mid-Level et toutes les autres exceptions au cap space, le maximum en cas d’extension, bref tous les critères de l’actuel CBA vont être remis en question avec cette forte croissance de revenus de la ligue et donc de ses franchises. Toutes ces questions seront encore plus en ligne de mire en 2017 lorsque le moment sera venu pour les joueurs de négocier avec les propriétaires un nouvel accord collectif (CBA, Collective Bargaining Agreement).

Lock-out en 2017 et âge d’or pour la Grande Ligue

Déjà que la valeur des franchises NBA était sérieusement en hausse ces derniers temps. Les Bucks rachetés 550 millions de dollars, les Clippers récupérés par Steve Ballmer pour la modique somme de 2 milliards ou encore un Mikhail Prokhorov qui essaie de revendre ses Nets 5 fois plus cher que ce qu’ils ne lui ont coûté, autant d’éléments très positifs et réjouissants pour les heureux propriétaires d’une franchise actuellement. D’autant plus que la récente annonce d’augmentation fulgurante des droits TV ne va clairement pas enrayer cette tendance, bien au contraire… La valeur des franchises va continuer de monter au fur et à mesure que les bénéfices continueront de croître. Il faut savoir que sur l’exercice 2013/2014, une seule franchise a perdu de l’argent : les Nets et leurs dépenses salariales à la limite de la décence. Les plus gros marchés comme les Knicks ou les Lakers peuvent se targuer d’un Chiffre d’Affaires qui dépasse allègrement le milliard de dollar annuel. Tous les indicateurs sont au vert pour la NBA et ses propriétaires comme le fait justement remarquer Ted Leonsis, le propriétaire des Wizards :

“Il n’y a jamais eu de meilleure époque pour être propriétaire d’une équipe NBA.”

A noter que les Wizards vaudraient actuellement environ 1 milliard d’euros. Oui, 1 milliard d’euros, les Wizards ! Il sera donc bien difficile aux propriétaires de parler de difficultés financières en 2017 quand il s’agira de négocier le nouveau CBA avec l’union des joueurs. Inutile donc également de croire qu’un lock-out sera évité, c’est peu probable. C’est bien connu, plus on gagne d’argent, plus on veut en gagner encore et encore comme l’indique clairement Danny Granger :

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Danny Granger sur le nouveau deal de droits TV : “Ce sera définitivement un point de négociations pour le prochain CBA… Plus d’argent, plus de problèmes.”

Les joueurs, qui ont  – certainement à juste titre – la sensation de s’être fait un peu écraser lors du dernier lock-out en 2011, auront cette fois-ci de gros arguments pour réclamer un part toujours plus grosses des revenus de la NBA. En 2011, la part des joueurs a été ramenée de 57% à 50% après que les propriétaires aient fait le forcing et finalement obtenu gain de cause. En 2017, ce sera un toute affaire car, LeBron James en tête, les joueurs ont bien l’intention de ne rien lâcher cette fois-ci.

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LeBron a dit qu’il n’y avait “pas moyen” que les propriétaires prétendent être pauvres lors des prochaines négociations autour du CBA, pas “après que nous les ayons vu vendre des équipes pour des milliards”

Avec en plus cette augmentation des droits TV, les joueurs ne voudront pas entendre les propriétaires pleurer parce qu’ils perdent de l’argent :

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LeBron à propos des propriétaires essayant de clamer qu’ils perdent de l’argent : “Cette fois-ci, ça ne passera pas avec nous.”

Il y aura donc beaucoup d’argent à se partager entre joueurs et propriétaires quand ce contrat TV entrera en vigueur mais la bataille sera, encore une fois, très serrée et occasionnera très certainement un lock-out. Tout ce qu’on peut espérer, nous les fans, c’est que les négociations soient facilitées par les gros chèques d’ESPN et de TNT et qu’ainsi, le lock-out ne nous “coûte” aucun match de saison régulière. Michelle Roberts a d’ailleurs été claire sur le sujet concernant l’objectif de l’union lors des prochaines négociations :

“Notre travail va être de s’assurer que les joueurs reçoivent une part juste et que nous faisons tout ce qui est possible pour maintenir la croissance et la popularité du jeu (la NBA).”

En face, les propriétaires ne vont pas non plus “se coucher” comme ça, sans rien dire. Certains d’entre eux vont même sûrement continuer de militer pour un hard cap très strict concernant les salaires même s’il y a peu de chances que cela aboutisse car les joueurs ne voudront évidemment pas en entendre parler et voudront même tirer encore plus la couverture de leur côté comme le précise Brian Windhorst sur twitter :

tw brian windhorst

Avec LeBron qui pousse dans ce sens et Chris Paul à la tête de l’union, les joueurs pourraient aussi réclamer une augmentation voire carrément un remaniement du contrat max dans le cadre du CBA en 2017.

On n’y est pas encore mais préparons-nous à de sacrées batailles entre propriétaires milliardaires et joueurs multi-millionnaires en 2017 car, entre les proprios qui sont toujours plus avides de profits et les joueurs qui ont l’impression d’avoir fait un geste en 2011 (et qui voudront donc la monnaie de leur pièce en 2017), les discussions risquent d’être longues et tendues. Et comme d’habitude, ces discussions ne porteront que sur les histoires d’argent car avec cette manne financière venant des chaînes de télé, il n’est pas question une seconde d’envisager une éventuelle réduction du rythme effréné de la saison régulière afin de protéger l’intégrité physique des joueurs par exemple. Et oui messieurs, on ne peut pas tout avoir. Les télévisions vont vouloir leurs 82 matchs en saison et leurs Playoffs au complet. Peu importe si les organismes des acteurs souffrent voire ne tiennent pas la route. Après tout, ils sont payés pour…

La NBA  – qui fait déjà plus de 4 milliards de Chiffre d’Affaires par an (avec “seulement” 900 millions de droits TV) – s’engage dès à présent dans ce qui pourrait être son âge d’or, sa période la plus faste aussi bien financièrement que médiatiquement. Et ça, finalement, c’est plutôt une bonne nouvelle pour nous tous les fans de balle orange. Comme quoi, l’argent amène des discussions parfois houleuses, il ne fait pas le bonheur comme on dit mais il peut tout de même fortement y contribuer.

Source image couv’ : Hollywotion Studio