Mea culpa : Nicolas Batum mérite quelques explications après ses deux derniers matchs…

Le 14 sept. 2014 à 13:09 par Bastien Fontanieu

C’est la loi. Celle du sport. De l’analyse quotidienne, après des heures de réflexion et de longs moments d’hésitation. Malgré un Mondial démarré difficilement, Nicolas Batum a su élever son niveau de jeu quand il le fallait pour offrir à son pays une historique médaille de bronze : l’heure est aux explications.

C’est peu dire si on n’a pas été des plus doux avec l’ailier des Blazers. Depuis quelques temps d’ailleurs, que ce soit en NBA ou avec l’EDF. On ou je ? Nombreux sont les lecteurs qui ont suivi le ras-le-bol général manifesté notamment par moi-même et une partie de ma rédaction, lors du début du tournoi espagnol. En même temps, on ne va pas se mentir, nos attentes étaient au moins aussi élevées que celles des fans des Bulls avec un certain Derrick Rose. Pas de là à faire de notre Batman un futur MVP de la compétition, ce qui serait plutôt osé, mais au moins voir une vraie évolution dans le rôle tenu par l’ailier, qui possède tout ce qu’il faut pour dominer les ailiers internationaux, techniquement comme physiquement. Trop tendre, trop timide, pas assez agressif, sans véritable prise de responsabilité : les critiques allaient bon train au fur et à mesure que l’aventure avançait, jusqu’à atteindre un point de non-retour après une performance des plus critiquables face à l’Iran. Retour en arrière, vingt-quatre heures avant ce match. Quelques minutes après avoir pris une leçon par le pays hôte (match qu’on a totalement oublié depuis la victoire historique en quarts), l’ailier français s’exprimait avec une intensité rarement vue.

J’ai de la colère et de la frustration. On a bien joué une mi-temps puis on a reculé. On ne peut pas accepter d’être dominés ainsi, de les laisser jouer, de reculer sous leur pression et de finir si loin, même si le score a peu d’importance au final. Il faut désormais voir ce match comme une opportunité d’apprendre de nos erreurs d’aujourd’hui. On dit depuis hier que ce match ne compte pas vraiment, dans le sens où ça reste un match de poules. J’espère qu’on les retrouvera plus tard dans la compétition.

Le lendemain ? Avec un coaching particulier mais une équipe normalement facile à écarter, Batum montrera une attitude à l’opposé de ses propos antérieurs, prolongeant notre agacement à cause de ce comportement presque bipolaire : 15 minutes, 2 points, 2 tirs tentés. La France évite le pire en toute fin de rencontre, mais la casserole déborde et le fusil sort. C’en est trop. Après avoir déclaré précédemment qu’il méritait d’aller au All Star Game pour faire souffler Kevin Durant, après avoir annoncé qu’il prendrait à coeur ce rôle de leader au sein de l’Équipe de France, après avoir montré autant d’énervement suite à la défaite face à l’Espagne, Nicolas Batum devient alors la cible de nos plus belles punchlines. Le quart de finale face à l’Espagne rentre dans l’histoire mais les critiques restent bien là. Incapable de poster des joueurs qui lui rendent 20 centimètres ou de créer des fautes chez les intérieurs adverses puisqu’il campe sur l’extérieur, la victoire symbolique du 10 Septembre 2014 met en avant ces nouveaux héros français, ces Thomas Heurtel et Rudy Gobert devenus légendes d’un soir. Au loin, caché, Nico fait certes le boulot en défense mais il nous est impossible d’enlever sa toute nouvelle étiquette. Trop collée, presque tatouée, elle reflète des lacunes mentales qui ne demandent qu’à disparaitre. C’est ainsi que l’intéressé et ses détracteurs -dont nous- abordent les demi-finales du Mondial.

Source : Alvinet

Source : Alvinet

Ce qui suivra restera comme la plus belle paire de matchs joués par Nicolas Batum depuis sa première sélection avec la France. Deux chefs d’oeuvre qui mettront une grosse claque aux critiques, dont les nôtres, comme pour rappeler que son talent n’a presque pas d’égal à son poste sur le vieux continent. Quelques 24 heures au pays des hommes en feu, mais surtout une attitude revue à la hausse, cette fameuse attitude qu’on pointait du doigt pour ne pas correspondre à ce que son pays et le niveau de compétition demandait. Finis les bras ballants et les courses en trottant, bonjour les sourcils froncés et le poing rageur sur chaque action positive. Finies les balles données aux autres pour mieux se cacher dans le corner, Nico veut la gonfle et parvient même à faire secouer la terrible Serbie. Elle qui joue un basket parfait depuis la fin des poules, mettant à terre la Grèce puis le Brésil avec la manière, Sasha Djordjevic et ses sbires ne peuvent strictement rien faire contre Batman. La France part de trop loin, trop tard, mais elle aura effleuré la finale grâce au génie d’un homme, d’un soir : 35 points en 37 minutes, 8/12 de loin, des Français en délire devant cette performance unique, des bouches fermées comme s’il en pleuvait. Le lendemain, pour obtenir le podium et montrer que l’héroïsme de la veille n’était pas qu’un acte isolé, Nicolas remettra ça chez les voisins lituaniens. C’est reparti pour un tour ! Point statistique ? Après avoir planté 69 points et tenté 12 lancers en 7 rencontres, il en mettra 62 en deux jours tout en allant deux fois plus sur la ligne. Les isolations à 8 mètres du panier se sont transformées en pénétrations dangereuses, les mains tremblantes aux lancers deviennent une blague d’antan : avec 27 points pour son dernier match du Mondial, Batum termine la compétition sur la note qu’on voulait voir, celle d’un talent hors-norme qui peut dominer n’importe quel match de basket s’il le souhaite.

S’il le souhaite, telle est la condition. Car les critiques resteront bien là, dans le coin, comme lui lorsqu’il se planque dans un des deux corners. Encore trop irrégulier sur son approche des matchs et sa lecture du jeu, Nicolas Batum continuera à frustrer par séquences ses milliers de fans, eux qui souhaitent -comme nous- le voir dominer le basket mondial en utilisant le talent fou placé entre ses mains. Que ce soit à Portland cette saison ou avec la France l’an prochain, notre oeil restera vif et prêt pour pointer la moindre de ses erreurs. Cependant, la bouche elle, doit simplement rester fermée aujourd’hui. Merci Nicolas, et très honnêtement : on en redemande encore.

Source image :FIBA