Show Time Texan ou comment l’attaque des Spurs est en train de détruire le Heat

Le 13 juin 2014 à 17:05 par Alexandre Martin

Bien évidemment, après leur défaite de la nuit dernière – la deuxième consécutive sur leur parquet – les joueurs du Heat voient s’abattre sur eux une nuée de critiques tout à fait méritées. Au milieu de ce marasme floridien, LeBron James n’est pas forcément celui sur lequel s’abattent le plus la foudre et le mécontentement des supporters ou la moquerie de certains observateurs.

Dwyane Wade en prend pour son grade et c’est tout à fait logique tant l’arrière du Heat est pris en flagrant délit de sous performance aussi bien offensive que défensive depuis le début de ces finales. Mario Chalmers est inexistant et ce n’est guère mieux pour Chris Bosh par exemple. Le champion en titre en prend plein les dents dans les médias aujourd’hui et c’est compréhensible mais il ne faudrait pas que cela occulte le grand point d’exclamation de cette finale, l’élément essentiel des deux dernières victoires de San Antonio : un jeu d’attaque varié, collectif et d’une précision chirurgicale !!
Car si les Spurs effectuent indéniablement un très bon boulot défensif depuis le début de cette série notamment par Danny Green et Kawhi Leonard, il faut reconnaître qu’ils sont également bien aidés par ce Heat au sein duquel on a l’impression que si LeBron James est un bien ralenti, personne ne semble capable d’élever son niveau de jeu en attaque. Malheureusement pour eux, les Floridiens – qui avaient l’habitude de rester dans les matchs grâce à de gros passages en défense et de réussir leur fins de rencontres sur cette base en comptant sur LeBron pour faire le travail – sont en train d’exploser sous les coups de boutoirs à répétition portés par l’attaque des Spurs. L’exemple parfait sont, bien sûr, ce match 4 ainsi que la première mi-temps du match 3.

Le Show Time revit à San Antonio…

La nuit dernière, non seulement Tim Duncan a ajouté deux nouveaux records monstrueux à son palmarès herculéen, non seulement Boris Diaw nous a ébloui avec cette passe digne de Magic mais c’est bien toute l’équipe de Gregg Popovich qui nous a régalé en attaque en laminant méchamment et impitoyablement, pour la deuxième fois d’affilée, la défense du Heat d’habitude si étouffante. Et quand je dis “toute l’équipe” puisque chacun des 13 joueurs utilisés par Popovich a marqué au moins deux points. Même Aron Baynes ou Jeff Ayres qui n’ont joué que trois minutes et qui ne sont pas de génies offensifs, même Corey Joseph ou Marco Bellinelli qui n’ont joué que 4 minutes chacun. Tout le monde a marqué côté texan et personne n’a mis plus de 20 points non plus !
En revanche l’équipe, elle, a fini avec 107 points après en avoir marqué 111 au match précédent face à une équipe qui n’en encaissait qu’à peine plus de 97 en saison régulière… C’est bien là toute la force de ses Spurs : le danger peut venir de n’importe quel joueur même du plus obscure des remplaçants. Sur chaque possession, le ballon circule et quelque soit le joueur qui se retrouve en position favorable, il reçoit la balle ! Ce basket est total, il nécessite une parfaite exécution et un sens du collectif très au-dessus de la moyenne.

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Les Spurs dominent des deux côtés du terrain encore une fois en gagnant le match 4 107 – 86 ! Les 13 Spurs ont tous marqué dans cette victoire.

Le résultat : une fabuleuse symphonie offensive où les paniers s’enchaînent sans jamais que nous ayons l’impression de voir la même action, sans jamais que l’adversaire ne puisse réellement anticiper ou contrer ce mouvement incessant du ballon… La perfection façon Texas tout simplement ! Gagner deux matchs d’affilée dans l’American Airlines Arena le tout en jouant vraiment offensif, voilà qui est une première sur les quatre dernières saisons. Voilà qui pourrait bien permettre à San Antonio de prendre leur revanche sur les finales de 2013. Et Pat Riley peut déjà commencer à faire des cauchemars mais ce sont les Spurs qui offrent la meilleure imitation du Show Time des Lakers des années 80 ! Jouer à ce niveau et en assurant un tel spectacle en saison régulière ce n’est déjà pas évident mais là, nous sommes en finales NBA !! L’analyste de basketball insiders, Nate Duncan, n’hésite d’ailleurs pas à parler de l’une des meilleures équipes d’attaque de tous les temps :

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Je pense que nous pouvons aisément dire que cette équipe des Spurs est l’une des meilleures équipes offensives de tous les temps, bien que la vitesse de jeu des Finales va parfois masquer ça.

Notre Boris national au cœur du spectacle

Il est vrai qu’offensivement, le jeu de cette escouade – venue du Texas et dirigée par un véritable sorcier – est un modèle à montrer dans toutes les écoles de basket. Un modèle d’anti-égoïsme, de désir de faire plaisir à son coéquipier, de mettre un partenaire dans les meilleurs conditions, de se sacrifier pour le bien du collectif… A chaque possession (hors transition), les Spurs mettent en place un système. Du plus simple pick and roll à une mise en place tactique plus compliquée – nécessitant 8 écrans, 5 faux appels, 23 passes pour un tir au final – San Antonio exécute et même si le Heat est capable de très bien défendre sur les extérieurs tout en offrant de bonnes rotations pour protéger le cercle, ces Spurs ont fini par faire complètement craquer le double champion en titre. Là encore, les stats ne mentent pas et l’entreprise de destruction par l’attaque mise en musique par Tony, Timmy et toute la bande ressort dans tous les secteurs.
Déjà au tir ! C’est bien simple, les Spurs ont des shoots ouverts et ils les mettent dedans. Depuis le début de la série, San Antonio shoote à 54,2% ce qui est le deuxième meilleur pourcentage de l’histoire après 4 match de finale depuis l’instauration de l’horloge des 24 secondes derrière les 54,6% des Lakers de 1984…(selon NBA History). A noter que lors de ce match 4, les Spurs ont shooté à 74% dans la raquette (23/31).
Ensuite, le jeu de passes. Non seulement c’est beau mais, en plus, c’est diablement efficace ! Les spurs on fait 113 passes de plus que le Heat la nuit dernière ! (380 contre 267). Sur leurs 40 paniers marqués, 25 l’ont été à l’issue d’une passe décisive (contre 13 sur 32 pour le Heat). Et preuve – s’il en est encore besoin – du mouvement de balle prodigieux des Texans, on dénombre 15 “passes décisives secondaires” contre seulement 3 au Heat.

Source image : rollingstone.com

Source image : rollingstone.com

Symbole de tout cela, de cette alchimie à la limite du divin : Boris Diaw ! Le capitaine de l’équipe de France réalise de grands PlayOffs et, hier, il a fini la rencontre avec 8 points, 9 rebonds et 9 passes décisives. Jamais, depuis Michael Jordan en 1997, un joueur d’au moins 30 ans n’avait enregistré au moins 8 points, 9 passes décisives et 9 rebonds dans un match de finales. Voilà qui classe directement la performance de Babac dans le gratin de la balle orange. Mais au delà des stats, Boris Diaw est l’une des clés principales en attaque pour les Spurs. Tous les ballons passent par lui, il oriente, fait des différences, trouve des coéquipiers dans le rythme ou ouvert (ou les deux).
Bref, quand il est inspiré, les Spurs sont d’autant plus fluides. Sur ces finales, on constate clairement que si Kawhi Leonard et Danny Green sont les clés défensives, Boris Diaw et bien sûr Tony Parker – par ses pénétrations – sont les clés offensives du jeu de San Antonio. Une belle publicité pour l’école de basket française au passage. Pendant que Boris distribue depuis le poste haut ou le poste bas des ballons tous plus judicieux les uns que les autres, son pote Tony harcèle sans cesse la défense, obligeant LeBron James lui-même à venir défendre sur lui. Et, toujours dans cet état d’esprit collectif, TiPi ne force pas. Il attire la défense et délivre la bonne passe au bon moment. Qu’on ne se trompe pas, il n’y a que deux passes décisives dans la ligne de stats de Parker la nuit dernière mais combien de ses coéquipiers se sont retrouvés crédités d’une passe décisive alors que c’était leur français de meneur qui venait de créer un décalage irréversible ? Beaucoup…

Au final, ces Spurs mènent désormais 3 – 1 en ayant perdu le match 2 de 2 petits points après n’avoir pas su tuer la rencontre. En revanche, ils ont assuré leurs trois victoires par des écarts bien lourds (+15, + 19 et +21). On peut même se dire que si Tony Parker et Tim Duncan mettent leur lancers francs en fin de Game 2, la série serait peut-être déjà terminée. Ce n’est pas le cas. Les Spurs vont maintenant avoir l’occasion de finir le travail à la maison face à un Heat qui voudra certainement prouver qu’il vaut mieux que ce que nous venons de voir sur les deux derniers matchs. Tim, Tony, Manu et toute la bande ont les moyens d’en finir et de devenir la première équipe aussi portée vers l’offensive à gagner le titre depuis bien longtemps. Et ce ne serait que mérité pour une des plus belles attaques que nous ayons pu voir sur un parquet dans l’histoire NBA… 

Source image couv : lequipe.fr