Syndrôme James Harden : et si les Warriors devaient se séparer d’Harrison Barnes ?

Le 19 nov. 2013 à 17:12 par Bastien Fontanieu

Avoir un talent exceptionnel et des qualités athlétiques parfaitement compatibles avec celui-ci n’est pas forcément vu comme un don aux yeux de tout le monde. Ainsi, comment envisager l’avenir des Warriors sans se pencher sur le cas d’Harrison Barnes, qui sous de nombreux aspects croise celui d’un certain James Harden ?

N’importe quel fan de basket qui suivait décemment la NBA il y a une demi-douzaine d’années a forcément été séduit par le Thunder et son évolution fascinante. Cette bande de jeunes phénomènes aux dents longues offrait un jeu si efficace et spectaculaire qu’il était souvent perturbant de se rappeler que les joueurs majeurs de l’équipe avaient à peine le droit de commander une bière dans un bar des States. Cette ascension fulgurante de la jeunesse vers le sommet de la Ligue, vécue également comme un superbe pied-de-nez à l’organisation habituelle des franchises qui ne voulaient pas reconstruire uniquement via la Draft, trouvera son point de chute lors des Finales NBA de 2012 où Kevin Durant et compagnie échoueront logiquement face au Heat d’un LeBron James en mission personnelle. Dans cette défaite pleine de larmes et de promesses de réussite figuraient alors quatre membres majeurs du Thunder : Durant évidement, Russell Westbrook, James Harden et Serge Ibaka. Cette répartition des rôles, qui ne doit en rien retirer le gros boulot réalisé (à l’époque) par Kendrick Perkins et Derek Fisher notamment, rappelle cependant la situation dans laquelle se retrouvait la franchise d’Oklahoma City : une future impasse financière, reflet de la hiérarchie mise en place au sein de l’effectif.

En effet, avec l’évolution du Thunder venaient de facto les progrès de chaque joueur, en particulier le combo Westbrook-Durant auquel Serge Ibaka ajoutait défense et intensité physique pendant que James Harden faisait pleurer les défenses en sortie de banc et ajouter un énième manieur de ballon phénoménal en plus des deux loustics déjà nommés All Stars. Sam Presti, General Manager de la franchise, se retrouvera alors dans un siège des plus inconfortables, celui de prendre une décision long-terme aux conséquences immenses et qui hante non seulement aujourd’hui mais pour les années à venir les fans du Thunder : Ibaka ou Harden, Harden ou Ibaka. Tel un père à qui on doit demander quel enfant préfère-t-il ou faire dire à Michael Jordan qui est selon lui le meilleur entre Magic et Bird, Presti aura le malheur de voir évoluer sous ses yeux deux formidables joueurs sans avoir la possibilité de les garder sous le même toit. La suite on la connaît, plouf plouf, à-trois-on-ve-rra-qui-à-O-K-C-re-ste-ra, un deux trois : Ibaka. L’espagnol (sic) aura droit à une prolongation de contrat à hauteur de 48 millions de $ sur 4 ans, un soulagement évident dans le clan des fans en sachant que leur raquette serait protégée sur les prochaines saisons, mais également un compte à rebours évident avant de voir James Harden faire ses valises, puisque Westbrook et Durant avaient eux aussi obtenu leur gros chèque.

Le même été, le barbu gaucher fera alors partie de la Team USA et remportera une médaille d’or avec ses copains à Londres : leur dernière expérience en tant que coéquipiers. Quelques semaines plus tard, en analysant le compte en banque de son équipe et l’inévitable augmentation demandée par Harden qui ne fait que ce que tout le monde ferait, suivre Ibaka, Sam Presti dégainera la cartouche surprise, choquante pour nombreux, annoncée pour d’autres, en envoyant l’arrière à Houston contre ce que l’on sait aujourd’hui : trois fois rien. No disrespect envers Jeremy Lamb ou Kevin Martin, mais le Thunder a perdu sur ce transfert, et nettement plus que ce que l’on peut croire ou voir. Un choix qui fait aujourd’hui le bonheur des texans, et le malheur de leurs voisins : on ne fera pas de prédiction maya afin de déterminer l’avenir du Thunder, mais il y a actuellement autant de chances de voir Kevin Durant prolonger dans la campagne d’OKC que Utah en a de remporter le titre cette saison. La caractéristique numéro une des franchises situées dans les petits marchés, qui héritent d’une superstar mais ne prennent pas les décisions qu’il faut pour satisfaire cette dernière, vient donc frapper le Thunder de plein fouet. Du coup, comment faire le lien avec Harrison Barnes de Golden State ?

Après une sublime tournée au printemps dernier lors des PlayOffs, les Warriors ont décidé d’augmenter encore plus leurs chances d’atteindre les finales NBA en s’attirant Andre Iguodala sur leur aile. Un coup de pouce énorme quand on connaît la polyvalence du joueur, sa capacité à compléter le business entrepris par Stephen Curry et compagnie, et le brin de défense taille patron qu’il apporte vu le bagage technique impressionnant du vétéran dans sa propre moitié de terrain. Une excellente nouvelle donc pour les fans, mais qui encore une fois viendra peut-être ouvrir le livre que l’on croyait avoir rangé une bonne fois pour toute, et qui décrivait les aventures du petit Harden contées précédemment. D’un point de vue financier, les Warriors présentent les mêmes caractéristiques que le Thunder de la même époque, en alignant plusieurs contrats à gros chiffres (Lee, Bogut et Curry : 37 millions) tout en s’en permettant un énième (Iggy : 12 millions), soit 49 magnifiques millions de dollars déjà réservés pour les prochaines saisons. Une sécurité pour l’un, un vrai problème pour l’autre. Et l’autre en l’occurrence, c’est Harrison Barnes. Superbe scoreur déjà pour son âge, athlète exceptionnel quand on demande à Nikola Pekovic ce qu’il en pense, capable de poster les joueurs grâce à sa taille et son jeu de jambes, driver quand on veut le tester sur sa dextérité, et tirer pour les malheureux ne respectant pas son adresse. Une pépite rarissime donc, mais que les Warriors ne pourront jamais conserver. Vraiment ? Comment imaginer que le gamin, phénomène des lycées, déjà invité dans la Team USA et auteur de superbes PlayOffs en Mai dernier, souhaite rester derrière Andre Iguodala et Klay Thompson même si la possibilité de gagner des titres serait décuplée ? Comment concevoir dans son clan que le prochain joueur à recevoir un pactole n’est autre que Klay Thompson, qui fait un début de saison du tonnerre, et sera probablement l’Ibaka de Harden dans l’historique des décisions prises par le Thunder ? Harrison Barnes est un bijou, un futur All Star, le genre de joueur sur lequel une franchise pourrait se construire, et les Warriors le savent. Pas depuis hier, mais depuis bien longtemps, avant même cette Draft 2012 qui verra le club de la Baie tanker sa saison d’une terrible façon, afin de s’attirer les services du produit de North Carolina. Maintenant, comment le management des Dubs organisera-t-il l’avenir de sa franchise : nous le saurons dans les prochains mois.

Ce que l’on sait déjà, c’est que les Warriors représentent probablement la plus sérieuse menace aux Spurs dans la course au trône de la Conférence Ouest. Complète, jeune, grande, cette équipe a les moyens de réaliser ce que le Thunder avait fait en 2012 en achevant la bande à Parker pour participer à cette Finale tant espérée. Mais l’histoire pourrait se répéter une nouvelle fois du côté de la Baie, et si elle n’interviendra pas dans les mois à venir, on mettrait bien une pièce sur les Dubs dans un an pour voir comment la relation entre Barnes et son management se développe. Un peu comme James Harden et Sam Presti finalement…